Les soubresauts du véhicule s’étaient faits plus rares, et les reins d’Amsel connaissaient enfin le répit. Les roues spécialement faites pour glissaient désormais sur le sable sans un bruit, soulevant de très légères volutes. La chaleur était accablante – mais enroulée dans un épais châle de coton pensé pour ces paysages, l’archère parvenait à jouir d’une bonne humeur certaine. Elle l’avait battue à plate couture, la gamine. Bas ? Facile ? Pas si elle prenait encore en compte ses doutes sur l’identité d’Apfel.

Assise, une main soutenant son menton, elle avait fait preuve d’un peu de volonté - avait tendue de l’eau à Alwine, s’était efforcée de discuter un peu pour ne pas céder à la tentation. C’était difficile – l’avatar de sa compagne lui donnait au moins une excuse pour être étendue de tout son long et molassoner. S’allonger les bras ballants sur le bord du toit, dormir peut être un peu bercée par les remous, elle ne demandait que ca. Mais en tant que « chef de quête » ( ?) elle ne pouvait malheureusement pas se permettre un tel écart – ce serait paraitre bien insouciante. (Bon, après, elle joue aux cartes – mais ca c’est une autre affaire !)
Elle avait cédé à la rêverie cependant, les yeux dans le vague… Qu’était devenu son corps ? Comment aller Rielke ? Ils semblaient en cet instant parcourir des kilomètres à travers un désert immense, alors qu’en fait, tous les joueurs réunis dans l’embarcation étaient des êtres humains immobiles, assoupis et prisonniers de leur casque. Peut être allait elle mourir subitement, personne n’ayant remarqué sa disparition, mangée par son chat. Improbable bien sur, trop de temps avait déjà passé… Et son chat l’aimait.

Amsel haussa les sourcils à l’annonce de Pomme, mi concernée mi perplexe. Alors que la gamine sautillait à nouveau jusqu’au toit, elle tendait le cou pour regarder à l’horizon. Rien… Ha si, une légère brume à l’horizon. Très légère…

« Restez ici, dame Alwine. » Son regard ne voulait faire passer aucune inquiétude – interceptant la porte avant qu’elle n’ait eu le temps de se refermer, elle montait sur le marche pied et choppait la corniche pour atteindre le toit. Son arc apparaissait entre ses doigts alors qu’elle en atteignait le sommet, tout juste à temps pour...



La silhouette massive de ce qui semblait être un énorme vers leur barrait désormais la route – l’embarcation tournait de l’œil, marquait un virage brutal, les chevaux (si on pouvait appeler ça ainsi, dans la mesure ou il s’agissait plutôt de  gros mélanges propre au jeu) s’emballaient. Âme sel se maintint tant bien que mal sur le toit, grâce aux cordages des bagages. Ses dents crissèrent – ca sentait le roussis . Elle lançait un regard vers Pomme.
« Il faut calmer les chevaux ! »

Calée le monticule d’affaires, elle se redressait pour viser. Son arc l’espace d’un instant était parcouru d’un frisson de lumière. Des espaces de petits tentacules s’agitaient, autour de ce qui semblait être la bouche nouée de la créature ?
Les silhouettes trônant sur sa tête poussaient des cris et des rires, s’agitant. Tous se maintenaient au cordage enserrant le corps massif. A bien y regarder, le vers ne semblait pas là de son plein gré… Et il était lent. Une des silhouettes débraillées sauta soudain de la cime organique, déployant sur son dos et espèce de grand volant de cuir. Les vents du désert s’en emparaient, et il fonçait sur la caravane. Ni une ni deux, Âme Sel décochait.

Sur un être humain, c’était la première fois. Sa barre de vie s’affichait, ainsi que le symbole qu’elle avait espéré – PNJ. Un infime soupir lui échappait, de soulagement. L’homme tombait au vol et s’écrasait sur les sables du désert, la barre de vie bien entamée. Elle se saisissait de trois autres flèches – l’achevait de la première. Un petit serrement, quand même – la silhouette humaine éclatait.
« Apfel ! Je pense qu’on peut les semer et atteindre les Sjorn avant la nuit. » [/center] Sa voix se perdait un peu dans le vent mais devait les atteindre, elle décochait deux nouvelles flèches – l’une sur une seconde silhouette planante, l’autre… se perdait dans le flan de l’énorme Vers. C’était à contrecœur : la chose émit un bruit horrible, se contractant un peu sur elle-même.  « Je nous couvre. »

Ce n’étaient que des bandits, ils n’étaient pas forcément là pour Alwine. Et ils devaient avoir l’habitude des proies faciles… D’autant que les archers étaient rares – elle en avait croisé très peu jusqu’ici-, sa présence mettait en déroute leur méthode.